lundi 7 novembre 2011

Une belle de photo de famille

Au fait, combien de branches a notre arbre, réellement ?



samedi 5 novembre 2011

Photos des votes

 Jeanne nous rappelle de distinguer ce qui est urgent / important / ou pas / ou les deux 
pour faire et trier nos choix.




Et au final, c’est parmi ces grandes thématiques qu’une vingtaine d’orientations ont été votées puis classées par ordre d’urgence et de priorité :
1. Ce qui dépend des établissements scolaires
2. Certains sujets cibles pour l’éducation de la foi : les jeunes, les familles, tous
3. Communiquer
4. Faire vivre l’esprit de famille
5. Formation
6. Charisme et spiritualité
7. Les œuvres
8. Relations à l’international (volontariat, jumelage…)
9. Tournés vers l’Eglise
A suivre, donc, suite à nos différents conseils pour voir comment les orientations choisies devraient pouvoir être mises en oeuvre. 

vendredi 4 novembre 2011

Autres photos... jusqu'au samedi soir



Des temps de prière, de récollection...

La visite d'éminents personnages... (P. Lalane et Mère de Casteyras ici en grands habits)

Quelques nuits écourtées pour les collecteurs-rédacteurs, avec, fort heureusement, 
des âmes charitables pour les approvisionner...




vendredi 28 octobre 2011

Quelques photos en direct !

Voici quelques images de ce début d'assises.

 














Conférence du P. André Fétis donnée aux assises levendredi 28 octobre 2011

Voici le plan de la conférence donnée par la P. André Fétis.
Si vous souhaitez obtenir le texte dans son intégralité, veuillez envoyer un mél à l'adresse suivante, pour que je puisse vous l'envoyer : marie.vivien@free.fr




AVEC GUILLAUME-JOSEPH CHAMINADE
ET ADÈLE DE TRENQUELLÉON,
MISSIONNAIRES MARIANISTES DANS UN MONDE NOUVEAU



I.  –  UN MONDE NOUVEAU

1. UN VILLAGE RECOMPOSE
1.1. Les distances
1.2. La perception du temps
1.3. Les brassages de population
1.4. Questions nouvelles
1.5. La famille : forces et faiblesses

2. ECONOMIE ET JUSTICE SOCIALE
2.1. Une période de profondes transformations
2.2. Un climat de grande incertitude économique et sociale
2.3. Nous vivons au dessus de nos moyens
2.4. Pauvretés
2.5. Au niveau mondial, la "course aux terres", l'alimentation, les matières premières
2.6. Quelques questions

3. NOUVEAUX POUVOIRS ET LIBERTES
3.1. La valorisation de la liberté individuelle
3.2. L'engagement a fortement diminué.
3.3. Les grandes idéologies ont aussi perdu de leur impact
3.4. Mais qui nous dirige ?

4. L'homme en recherche de lui-même … et de Dieu
4.1. L'homme au centre ?
4.2. Qu'est-ce que la vérité ?
4.3. L'indifférence religieuse
4.4. Indifférence ou indifférences
a)    Les indifférents par éloignement progressif
b)    Les indifférents par substitution psychologique
Des facteurs qui favorisent l'indifférence :
a)    La sécularisation de la société
b)    L'activisme et le manque d'intériorité
c)    Une forme de syncrétisme
d)    La contagion de l'indifférence
4.5. L'ignorance religieuse




II. – MISSIONNAIRES DANS UN MONDE NOUVEAU

1. CHARISME ET MISSION
1.1. Un don pour le bien de tous
1.2. Une grâce reçue et vécue par un Fondateur
1.3. Un don incarné en trois dimensions

2. POUR UNE MISSION NOUVELLE : DES MISSIONNAIRES ANIMES PAR LA FOI
2.1. La foi, vertu théologale
2.2. Voir ! (Dissiper les ténèbres de notre esprit)
2.3. La foi, le remède contre l'indifférence (l'arme du nouveau combat contre l'indifférence)
2.4. La préparation du remède (de l'arme) : l'oraison de foi

3. LUTTER CONTRE L'IGNORANCE RELIGIEUSE
3.1. Un des objectifs de la naissance de la Famille marianiste
3.2. Prévenir de la corruption de l'intelligence
3.3. La formation ("l'instruction") : une dimension irréductible de tout projet marianiste
3.4. L'école
3.5. "Les jeunes et les pauvres surtout" (Lettre 24 août 1839)
3.6. D'autres appels encore…

4. POUR UN MONDE PLUS JUSTE
4.1 Mission marianiste et solidarité
4.2. Critères pour un engagement social marianiste
"Les jeunes et les pauvres surtout"
Le rôle et la dignité de la femme
La famille
4.3. Les appels de l'Église et de nos organismes internationaux

5. UNE COMMUNAUTÉ MARIALE
5.1. Une alliance missionnaire
5.2. Incarnation
5.3. Dans la présence rayonnante du Christ
5.4. Dans l'union sans confusion des états de vie
5.5. A l'image de la communauté de Jérusalem


CONCLUSIONS
1. Discerner
2. Une opportunité nouvelle ?
3. Reprendre l'initiative



TEXTES EN VRAC
Société de Marie ; Constitutions 1839 § 339.
Joie ; Saint Augustin
Dificultades para evangelizar a los indiferentes
Des pierres d'attente, et, pourquoi pas, des germes de l'Esprit ?
Guy Coq : l'indifférence ne doit pas être un masque qui cacherait les attentes spi présentes dans notre société (Doc Ep 2009/3, pp. 12-18)
"Ceux que nous nommons, entre nous, indifférents (à l'Église, au christianisme) sont passionnés par les grandes questions anthropologiques, par l'enjeu des valeurs. Et il y a aurait à questionner sans a priori méprisant, la montée de l'intérêt pour la "spiritualité""[1]
González-Carvajal Santabárbara, Luis, La indiferencia religiosa en la sociedad postmoderna, Centro Marianista de Formación (CEMF), Jornadas de la Familia Marianista 2010-2011, Madrid, 18 de octubre de 2010, pp. 15-16.

LA COMMUNAUTE
L’auto-évangélisation de la communauté chrétienne



[1] DAGENS Claude, Mgr, "Indifférence religieuse et visibilité de l'Eglise. Les enjeux d'un discernement spirituel", in : CONFERENCE DES EVEQUES DE France, Documents Episcopat, 2009/3, p. 14.

vendredi 19 août 2011

Vos contributions en vue des assises

Chers amis, qui avez accepté de participer d'une façon ou d'une autre aux assises marianistes,

Vous avez certainement reçu un mél d'Agnès Pitoux vous invitant à répondre à la question suivante :
"Quelles propositions concrètes imaginez-vous pour mettre la famille marianiste au service de l'Eglise et du monde ?"

Le comité de pilotage des assises attend avec impatience vos contributions afin d'ajuster au mieux le programme de ces journées qui nous attendent du 27 au 30 octobre prochains.
N'hésitez donc pas à poster un commentaire, nominatif ou anonyme sur cette page, ou bien envoyez un mél au P. Léo Pauels : leopauels@yahoo.fr

Nous comptons aussi sur votre prière : que nous soyons être dociles à l'action de l'Esprit Saint.

Bien fraternellement,

Le comité de pilotage des assises

jeudi 30 juin 2011

« S’OUVRIR AUX TEMPS NOUVEAUX » - REFLEXIONS DE JEAN-CLAUDE GUILLEBAUD

« S’OUVRIR AUX TEMPS NOUVEAUX »
REFLEXIONS DE JEAN-CLAUDE GUILLEBAUD

Rencontre des responsables nationaux des mouvements et associations de fidèles – Paris, le 8 février 2011

L’expression « temps nouveaux » a été galvaudée. Chaque génération qui succède à la génération précédente a le sentiment d’entrer dans des temps nouveaux. Pour une fois cette expression n’est pas galvaudée. Je pense réellement que nous entrons dans des temps encore plus nouveaux que vous l’imaginez vous-mêmes et que je l’imaginais moi-même il y a 20 ans quand j’ai changé de métier pour essayer de réfléchir de manière plus approfondie à cette question des temps nouveaux.
Il faut que je vous dise ce qui m'a conduit à me passionner pour cette question de l’immense mutation que nous sommes en train de vivre.
Je suis né en 1944, j’ai fait des études de droit, je me destinais à être agrégé en droit, j’ai été détourné de l’agrégation par Mai 68 et je suis devenu journaliste à une époque où mon père considérait que le métier de journaliste n’était pas un métier sérieux. J’ai fait ce métier avec passion pendant un peu moins de 20 ans, et le hasard a fait que je suis devenu grand reporter d’abord à Sud-Ouest à Bordeaux où j’ai fait mes études sous l’égide de Jacques Ellul, un maître, un ami et en même temps un grand théologien protestant et ensuite au Monde où je suis entré en 1971 et où je suis devenu le préposé aux catastrophes c’est-à-dire les guerres, les révolutions, les famines, que j’ai couvertes avec une vraie passion dans les années 70 et dans les années 80.
J’ai connu les années fastes du Monde où Le Monde avait un prestige international considérable et j’ai fait ce métier avec un peu de frénésie mais avec une vraie passion. Vers le milieu des années 80, j’ai demandé un rendez-vous au directeur du Monde, Jacques Fauvet, pour lui dire que je voulais quitter Le Monde. Il m’a d’abord répondu : « quitter Le
Monde ça n’existe pas ». Mais si je voulais quitter le Monde c’était pour une raison de fond. Les reporters ne sont pas plus intelligents que leurs amis qui sont devenus professeurs de droit, notaires, médecins, prêtres, ou évêques, etc. sauf que le fait d’être continûment sur le terrain, à travers le monde, c’est un peu comme les troupeaux qui sont dans les prairies et qui sentent venir l’orage un peu en avance. C’est vrai, ça nous rendait un petit peu plus lucides ou mieux avertis à propos des immenses changements qui s’annonçaient. Dès le début des années 80, j’avais l’intuition que nous allions connaître des mutations de toutes sortes qui allaient nous entraîner dans une mutation au moins aussi importante que la fin de l’Empire romain ou que la Renaissance.
Dès la fin des années 80, dès l’élection de Jean Paul II, il y avait les prémices de l’effondrement du communisme, donc la reconfiguration du monde avec la sortie de la guerre froide, et un monde partagé en 2 camps, c’est-à-dire d’un changement géopolitique considérable, en même temps le début de la mondialisation qui allait changer la donne économique mondiale, qui allait changer notre rapport à l’économie,
En même temps, avec la révolution numérique, nous entrons désormais
dans un monde numérisé complètement, qui change en profondeur notre rapport à la connaissance, au réel, à la communication, à la culture, à l’éducation, au commerce, la numérisation du monde qui ne fait que commencer, et qui va s’accélérer considérablement dans les 5/6 années à venir, c’est une révolution considérable.
En même temps, et c’est une extraordinaire coïncidence, nous avons vu naître et s’enraciner la révolution bio-génétique (révision des lois bioéthiques) et nous sentons bien que cette révolution génétique change en profondeur notre rapport non seulement au monde mais à la vie elle-même.
C’est-à-dire, qu’elle change brusquement ces choses que nous pensions immuables depuis des siècles et qui sont les structures de la parenté. Aujourd’hui, par le biais de la procréation médicalement assistée, des dépistages pré-implantatoires des embryons nous savons bien que nous sommes entraînés dans des transformations à la fois inquiétantes et prometteuses.
J’ai couvert les débuts et l’achèvement de la révolution en Iran. J’ai vu naître ce que Michel Foucault a appelé à juste titre à l’époque la première révolution religieuse de l’histoire et en tout cas de l’après-guerre.
Etant à Téhéran à l’époque, je sentais bien que cette révolution-là ne ressemblait pas aux autres, qu’elle n’opposait pas des pauvres à des riches, ce n’était pas une lutte d’un impérialisme contre un autre, mais c’était une révolution qui s’enracinait dans l’identitaire et dans le religieux et qui annonçait une forme de violence spécifique dont nous savons aujourd’hui qu’elle parcourt le monde. J’avais le sentiment quand j’ai demandé rendez-vous à Jacques Fauvet qu’on allait entrer dans une mutation tellement considérable que je n’étais pas armé pour essayer de la comprendre, parce qu’elle correspondait avec l’arrivée de problématiques nouvelles, de disciplines du savoir nouvelles, à propos desquelles je n’avais pas grande lumière. Je pense aux sciences cognitives, la pensée cybernétique, qu’est-ce que c’est qu’un algorithme, comment fonctionne le cerveau, la neurophysique, la neuroscience ?
J’avais le sentiment d’un immense retard et j’avais surtout une fringale de lecture, d’approfondissement. Jacques Fauvet a fini par comprendre que mon envie de changer de métier était réelle.
J’ai donc quitté le journalisme et Le Monde et je suis entré aux Editions du Seuil où on m’a chargé de m’occuper des sciences humaines, ce qui correspondait exactement à ce dont j’avais envie à l’époque, c’est-à-dire lire, rencontrer les grands auteurs, rencontrer les gens de toutes les disciplines qui réfléchissaient à cette question : qu’est ce qui nous arrive, qu’est-ce que c’est que cette mutation ? J’ai partagé pendant les premières années un bureau avec Jean-Marie Domenach qui venait de quitter la direction de la revue Esprit et partageait le sentiment un peu confus que j’avais que nous allions au-devant de transformations gigantesques. Il avait écrit un livre « Enquête sur les idées contemporaines », une série de longs articles que lui avait commandés
Jean Boissonnat, autrement dit nous étions sur la même longueur d’ondes.
J’ai donc eu la chance pendant 11 ans de 1983 à 1994 de m’occuper des sciences humaines, c’est-à-dire de devenir l’interlocuteur, l’éditeur, et l’ami de gens qui m’impressionnaient beaucoup et que jusqu’alors je lisais timidement de loin, comme Edgar Morin, Michel Serres, Henri
Atlan, Jean-Pierre Dupuis et tant d’autres, à qui je dois beaucoup. Ma fonction impliquait aussi de couvrir les grands colloques internationaux qui ont été très nombreux dans les années 80 et jusqu’au début des
années 90. Ces colloques étaient tous axés sur cette question : quels sont les temps nouveaux dans lesquels nous allons entrer, qu’est-ce qui nous arrive ? Avec l’arrière-pensée de ne pas succomber à l‘inquiétude.
Je pense que quand un vieux monde est en train de disparaître, surtout quand c’est celui dans lequel on a été élevé, on est saisi par l’inquiétude et j’aime beaucoup citer cette phrase de Gandhi qui m’a habité pendant ces années-là : un arbre qui tombe fait beaucoup de bruit, une forêt qui germe ne s’entend pas. C’est vrai que l’inquiétude qui domine et qui est légitime, j’ai appelé ça le désarroi contemporain. Dans mon esprit désarroi ça veut dire que nous sommes saisis par l’inquiétude parce que nous avons beaucoup de peine à comprendre ce qui nous arrive. Les mutations de cette importance, c’est en général 2 ou 3 siècles plus tard, avec le recul, qu’on peut les désigner du doigt. Je ne pense pas que les contemporains de St Augustin qui est mort en 430 dans son évêché d’Hippone assiégé par les barbares, ni St Augustin lui-même, aient pu se dire tient voilà la fin de l’Empire romain, voilà bientôt que va commencer la féodalité chrétienne. Je ne pense pas de la même façon que les contemporains de Montaigne, 1000 ans plus tard, aient pu se dire tient voilà la fin du Moyen Age nous allons entrer dans la Renaissance. Et je ne pense pas non plus que les contemporains de Diderot et d’Alembert aient pu se dire voilà le siècle des lumières et nous entrons bientôt dans l’ère industrielle.
Je veux dire que les contemporains n’ont jamais compris les événements qu’ils vivaient et ils ont presque toujours été habités par l’inquiétude.
Cette idée que j’avais en tête, je la trouvais très importante parce qu’elle m’aidait à apprivoiser ma propre inquiétude. Je pense que la phrase de
Jean-Paul II « n’ayez pas peur » n’a jamais eu autant de pertinence et autant d’actualité qu’aujourd’hui.
J’ai donc suivi tous ces colloques, j’ai effectué ce qui était pour moi une sorte de recyclage intellectuel, j’étais d’ailleurs obligé de les suivre de très près car on en publiait les actes au Seuil. Ces colloques rassemblaient presque toujours, (surtout à Stanford en Californie, sous l’égide de René Girard) des prix Nobel, des spécialistes venus de toutes les disciplines du savoir avec le souci de mettre en commun leur interprétation de ce qui nous arrivait, de croiser les savoirs, il y avait des neurophysiciens, des mathématiciens, des représentants des sciences molles comme les appellent les américains (philosophes, psychologues).
Ces colloques ont toujours été dominés par la même idée : qu’est ce qui nous arrive ?
Au cours de mes 10 années « colloques », j’ai pris conscience de l’ampleur des changements et j’ai essayé par la suite de faire comprendre à mes contemporains que nous étions en train de vivre un moment axial, j’emprunte cette expression au philosophe allemand Karl
Jaspers qui l’employait pour parler du Ve siècle avant JC quand les grandes religions sont nées en même temps, quand on a inventé la philosophie. Je pense que le moment axial que nous vivons est radicalement plus important, plus vertigineux, plus prometteur et plus inquiétant aussi que les exemples que j’ai cités devant vous que sont la fin de l’Empire romain ou la Renaissance. La thèse de Michel Serres que j’ai souvent entendu dans les colloques, je la trouvais abusive au début et je m’y suis rangé volontiers. Michel Serres pense que nous sortons de la période néolithique. Pour trouver un basculement aussi important il faut retourner 12 000 ans en arrière c'est-à-dire la période de la révolution du néolithique au paléolithique. C’est le moment où les hommes ont cessé d’être nomades pour être sédentaires, c’est le moment où ils ont cessé d’être cueilleurs de fruits dans la forêt pour être agriculteurs, c’est le moment où ils ont cessé d’être chasseurs pour être éleveurs. On peut dire que c’est le commencement de la civilisation et en tout cas c’est l’irruption de la sédentarité. Michel Serres, René Girard et Edgar Morin, dans ces colloques, pestaient toujours, à juste titre, contre ce qu’ils appelaient la parcellisation du savoir c’est-à-dire face à des changements aussi considérables, ne croyez pas que la vie intellectuelle soit amorphe, elle est au contraire très vigoureuse, très active, très énergique, très créatrice, très féconde, même si ça ne transparaît pas dans la sottise médiatique ambiante, sauf que ces réflexions se mènent de manière cloisonnée, séparée, segmentée. Inlassablement, à cause de la
complexité du savoir, les physiciens font de la physique, les généticiens font de la génétique, les informaticiens font de l’informatique, les sociologues font de la sociologie, les théologiens font de la théologie et il y a peu de communication entre eux, ce qui fait que pour nos contemporains, et pour nous-mêmes qui essayons de comprendre ce qui nous arrive, nous sommes devant une masse de savoirs considérable mais qui est un peu comme un miroir brisé. Les savoirs sont devant nous coupés en morceaux et rien n’est plus urgent et utile que de relier les connaissances car aucun changement ne peut être compréhensible s’il n’est pas éclairé par une discipline d’à côté. On ne peut pas avoir un jugement assez sûr et informé sur l’économie et la mondialisation si on ne fait pas intervenir quelques réflexions plutôt anthropologiques ou plutôt politiques ou sociologiques, etc et ainsi de suite. On ne peut pas avoir de point de vue sur le débat bioéthique si l’on ne fait pas intervenir autre chose que la bioéthique proprement dite, c’est-à-dire la philosophie, voire la philosophie morale, voire même la théologie.
Autrement dit la parcellisation des connaissances justifie en grande partie notre inquiétude. Michel Serres ajoutait à cela le corporatisme universitaire. Si vous êtes étiqueté sociologue, vous ne pouvez intervenir qu’en sociologie, si vous êtes étiqueté économiste, vous ne pouvez intervenir que dans le champ de l’économie, vous êtes assigné à votre discipline et, si vous en sortez, il y aura toujours quelqu’un qui vous dira vous n’êtes pas économiste, vous n’êtes pas philosophe, etc. Chacun est assigné à sa discipline ce qui fait que les croisements entre les savoirs ont assez peu cours et sont assez difficiles. J’ai une image, une réflexion de Mark Twain, l’écrivain américain : « quand on a la tête en forme de marteau on voit tous les problèmes sous forme de clous ». De fait, c’est à cela que conduit le corporatisme universitaire. Chaque membre d’une discipline du savoir à tendance à tout expliquer à travers sa propre discipline. Si vous écoutez un économiste il vous expliquera que ce qui est sérieux c’est l’économie, tout le reste c’est du baratin ; un généticien expliquera que tout s’explique par l’ADN et la génétique. Vous avez remarqué que c’est à cela que nous sommes soumis quotidiennement par le discours général, celui des médias. Surtout que ce corporatisme universitaire s’aggrave d’un faux rapport au savoir. A la TV c’est très bien vu d’inviter un prix Nobel dans une émission, mais ce n’est pas pour l’interroger sur sa discipline, par exemple la physique moléculaire, mais pour lui demander ce qu’il pense par exemple du mariage des homosexuels, ce pour quoi il a le droit d’avoir une opinion mais qui n’est pas plus valable que la vôtre, autrement dit il y a beaucoup de faux discours qui nous sont tenus au nom d’une majesté d’un savoir, au nom d’une majesté de la science et cela d’une manière indue.
Michel Serres, avec qui je travaillais depuis une dizaine d’années, un jour m’a assigné une mission : me faire le messager interdisciplinaire qui pourra croiser les réflexions et les savoirs. C’est comme cela que je me suis lancé dans des livres qui n’étaient plus tout à fait des livres de journaliste. J’ai publié le premier, « La trahison des lumières », en 1995.
Je parlais de beaucoup de disciplines à la fois : je parlais de St Augustin,  de l’économie, de la technologie, de l’informatique, j’essayais en effet de croiser des disciplines et j’avais très peur de ne pas être pris au sérieux et je dois à une dame, à qui je veux rendre hommage, de m’avoir conforté, et encouragé et cette dame c’était Françoise Lhéritier qui, à l’époque, avait la chaire d’anthropologie au Collège de France, et qui dans un cocktail au Seuil est venue me voir en me disant : Jean-Claude
Guillebaud, j’ai lu votre livre, je crois comprendre ce que vous essayez d’engager, continuez, ça sera utile pour nous tous.
Et j’ai eu l’audace de faire 7 gros livres dans la série Enquête sur le désarroi contemporain.
Pour être concret, je peux vous dire -parce que ça nous intéresse directement- y compris nous chrétiens, ce que je retiens de ces 15 années passionnantes de lecture, d’écriture, etc.
Je retiens d’avoir approfondi la conscience très nette de l’ampleur gigantesque des changements ;
J’ai acquis la conviction que chacune de ces mutations, comme d’habitude, était porteuse d’autant de promesses que de menaces. Que ce soit la génétique, l’économie, la géopolitique, le «retour du religieux», ces choses sont porteuses de menaces et de promesses et qu’il nous appartenait à nous de conjurer les menaces et de faire advenir les promesses c’est-à-dire que ces changements si on les regarde avec calme, sans peur, je pense qu’ils s’adressent à nous directement.
« N’attendez rien du XXIe siècle… parce que le XXIe siècle attend tout de vous » (Pablo Neruda).
Cela étant dit, je voudrais vous donner quelques indications en tant que chrétien. D’abord une constatation : quand j’ai commencé à écrire ces grands livres, je n’avais pas d’intention apologétique, c’est-à-dire que je n’avais pas l’ambition de rejustifier le christianisme, dont je m’étais assez éloigné, sans rupture, mais comme les gens de ma génération, et c’est la raison, la réflexion, notamment sur la question des valeurs qui, à mon insu, m’ont ramené à la prise de conscience bouleversante et bouleversée de la pertinence du message évangélique. Il y a des gens qui redeviennent chrétiens, comme Claudel, derrière un pilier de Notre-
Dame, ou comme André Frossard qui a écrit « Dieu existe, je l’ai rencontré ». Il y a comme cela des gens qui redeviennent chrétiens par la grâce, c’est-à-dire qu’ils prennent l’ascenseur, il y en a d’autres, comme moi qui redeviennent chrétiens par l’escalier. Je suis revenu à la prise de conscience à quel point la modernité que nous vivions était un phénomène post chrétien, à quel point nous étions dans un monde qui était le produit, le fruit, le fils, l’enfant, du christianisme, du judaïsme et de la pensée grecque ; et cela même si les églises sont vides, même si les séminaires sont dépeuplés, même si nous lisons qu’il n’y a plus que
40 % de personnes qui croient en Dieu. De manière très concrète, on ne peut pas comprendre les valeurs, les convictions qu’il s’agit de défendre et qui habitent la modernité, et que défendent des gens qui n’ont pas le sentiment d’être chrétiens, on ne peut pas les comprendre sans référence au biblique. On ne peut pas comprendre pourquoi nous sommes tous adhérents au principe de l’égalité entre les hommes. Nous sommes tous convaincus qu’il n’y a qu’une humanité et qu’il n’y en a pas plusieurs, qu’il n’y a pas des hommes et des sous-hommes, on ne peut guère comprendre cette idée là sans référence à l’épitre aux Galates de
Paul, ou à la tradition chrétienne ou à la controverse de Valladolid.
J’ai le sentiment que le christianisme est beaucoup plus présent dans le monde, même s’il est présent de manière invisible, que souvent nous le pensons.
René Girard, un jour, m’avait dit : « c’est ce qu’il reste du christianisme en elle qui empêche la société moderne d’exploser », je pense qu’il avait raison. Une fois, concernant la crise des vocations, il m’a dit : une ou deux générations de catacombes, ça ne ferait peut-être pas de mal au christianisme. Il y avait une part de vérité.
Je pense que, paradoxalement, ces temps nouveaux dans lesquels nous entrons, ouvrent une chance au christianisme fondamental.
J’avais intitulé un séminaire que j’ai fait à la faculté de théologie d’Ottawa
« La nouvelle chance du christianisme » et je pense réellement que ces temps nouveaux offrent une immense chance au christianisme. Autre remarque un peu plus journalistique :
Je ne crois pas être exagérément optimiste mais je suis toujours surpris, après avoir voyagé dans le monde, de trouver à mon retour en France ce sentiment que le christianisme est moribond. Nous ne nous rendons pas compte qu’en pensant cela nous avons un réflexe provincial. Si vous saviez comme il se porte bien ailleurs ! Trois exemples très précis.
Comme journaliste, J’ai couvert la fin du communisme pour le Nouvel
Observateur et j’ai beaucoup voyagé dans toute la Russie, en Sibérie, à
Moscou.
Je vous prends l’exemple de la Russie. Il s’est passé au cours des 20 dernières années un phénomène gigantesque, incroyable, que personne n’avait prévu, c’est la re-christianisation de la Russie à une vitesse dont vous n’avez pas idée. Je suis un grand admirateur d’Alexandre Men, ce prêtre orthodoxe qui a été assassiné en septembre1990 à Moscou et qui a été l’un des artisans de cette re-christianisation. C’était un ami de Mgr
Lustiger, un juif converti lui aussi. C’est en 1988 qu’il a commencé à pouvoir parler librement de sa foi, c’est cette année-là que la Douma a rendu au peuple russe la liberté religieuse après 75 années d’athéisme obligatoire, de volonté d’éradiquer Dieu de la société soviétique. En 88, les croyants ont eu droit à la parole. On sait qu’en 88 il n’y avait plus que
4 monastères dans toute la Russie en ruines et habités par des moines
octo ou nonagénaires. La plupart des églises russes étaient transformées en granges, en étables, en garages, elles avaient toutes été dé-consacrées. 22 ans plus tard, il y a 450 monastères en Russie, tous habités par des moines jeunes et dynamiques. Toutes les églises russes ont été reconstruites, re-consacrées et elles sont pleines de jeunes tous les dimanches.
Personne ne pouvait prévoir que la Russie se rechristianiserait avec cette rapidité. On s’est aperçu que depuis 77 ans, c’est-à-dire en 3 générations, les objets du culte étaient transmis de génération en génération dans les familles, c’est dire que l’espérance était ancrée profond et qu’elle n’a pas été déracinée.
Au Vietnam où je suis allé l’année dernière, il y a 7 % de catholiques, mais ces 7 % de catholiques qui continuent à être un peu persécutés par le régime ils redressent la tête, continuent à faire des choses inimaginables il y a 4 ou 5 ans, des défilés pacifiques dans les rues d’Hanoï, pour réclamer des petites choses pour les pauvres.
Un jour à Hanoï on nous a invités à assister à la messe. Une assemblée bondée, dont la moyenne d’âge tournait autour de 35 ans. Quand on a eu une petite conversation autour d’une table avec le directeur du séminaire d’Hanoï, on lui a demandé quels étaient ses problèmes du
moment, on s’attendait à ce qu’il dise les persécutions du pouvoir qui essaye de confisquer à l’église ce qui lui reste comme terrains ou comme biens, il nous a dit non, mon 1er problème c’est que je manque  de place. J’ai 150 séminaristes et il me faudrait au moins autant de places en plus. Ça veut dire qu’il y a une vitalité.
Quand on rentre en France et qu’on voit nos amis chrétiens moroses ou désenchantés, il faudrait qu’ils prennent l’air, qu’ils aillent voir ailleurs, parce qu’ils pourraient voir la même chose en Chine où le christianisme progresse très vite.
Un autre exemple plus récent, puisque ça date de mon voyage du mois d’octobre en Ethiopie, un pays sorti il n’y a pas longtemps du marxisme.
Je n’avais jamais imaginé qu’il y ait en Ethiopie un retour à la foi des jeunes aussi massif et aussi impressionnant. Ce qui se passe en
Ethiopie est une leçon pour nous parce que c’est un pays qui a été christianisé avant nous, au IVe siècle, et c’est un pays qui en tant que chrétien a été ensuite assiégé en permanence par les musulmans de l’extérieur. L’Ethiopie est un petit bastion chrétien, les hauts plateaux éthiopiens, qui a été assiégé par les mhadistes venus du Soudan et qui a fait la guerre à ses frontières pour défendre son identité chrétienne. En même temps, et c’est une leçon bouleversante pour nous, c’est un pays qui compte 40 % de musulmans. Autant l’Ethiopie s’est battue aux frontières pour défendre son intégrité, autant il n’y a jamais eu, de mémoire d’homme, la moindre violence interreligieuse. Nous avons assisté à des mariages où se mêlaient chrétiens et musulmans, il y a une grande fête chrétienne, la fête du Mescal, la fête de la Vierge, que respectent et qu’observent les musulmans.
Dans la ville d’Harar, la ville de Rimbaud, la 4e ville sainte de l’Islam, la
ville aux 99 mosquées, tous les matins nous étions réveillés par les chants des muezzins et les chœurs orthodoxes en même temps. La cathédrale orthodoxe est pleine à chaque fois qu’il y a une messe et ça se passe dans une concorde, dans une amitié, dans une relation entre musulmans et chrétiens qui est une leçon formidable pour nous. Je ne me résous pas à être pessimiste.
Ce que je sais aussi c’est que l’institution catholique est en crise.
Il faudrait tout de suite ajouter que c’est normal dans une période de mutation. Toutes les autres institutions sont en crise, au moins aussi grave. La justice, l’école, la politique, la famille.
Je pense que dans les périodes de crise, quand les institutions vacillent, ce qui tient la société debout c’est le monde associatif et je ne dis pas cela pour vous flatter. Ce sont ces millions de français anonymes qui sont engagés quotidiennement dans l’action, dans la solidarité. Depuis une trentaine d’années, toutes ces associations caritatives, mais aussi culturelles qui souvent prennent le relais de la médiocrité médiatique où les choses se passent, vous n’avez pas idée de la vitalité du monde associatif en ce moment. Je pense à ces millions de français, dont vous faites partie, et que j’appelle les sentinelles du désastre c’est grâce à elles que le monde tient encore, c’est grâce à elles que ce n’est pas la révolution en France malgré les 3 millions de chômeurs et plus.
Pourquoi ? Parce qu’il y a les ravaudeurs inlassables du tissu social qui sont représentés par le monde associatif.
Je pense que dans l’Eglise c’est la même chose. Je pense que si l’institution est en crise, les laïcs ont un rôle nouveau, stimulant et fondamental à jouer.
Je suis convaincu que le christianisme a de beaux jours devant lui.
J’ai toujours en tête cette phrase d’Alexandre Men, qu’il a prononcée la veille de sa mort, alors qu’il faisait une conférence à Moscou devant des intellectuels : l’histoire du christianisme ne fait que commencer.
J’adhère volontiers à cette formule. Sauf que l’histoire du christianisme ça ne veut pas forcément dire que son expression, son organisation sera la même demain. Les choses changent, se transforment et qu’à notre mode de vie en réseaux, largement immatériel, correspondra sans doute un autre mode d’organisation de l’Eglise. Mais ce n’est pas parce que les choses changent qu’il faut désespérer de ce changement.
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Questions ou réactions
Pouvez-vous développer un peu ce que vous avez appelé « la nouvelle chance du christianisme » ?
Je pense que nous sommes en train de sortir des temps du cynisme.
Nous avons vécu depuis les 20 dernières années un temps dominé par la dérision, la rigolade, par le cynisme, par cette espèce de désespérance et de déréliction et regardez aujourd’hui comme on s’interroge sur le sens, les valeurs, l’honnêteté, la probité.
Regardez ce qui se passe en Egypte. Sur la place du Caire où les jeunes sont assiégés, et où dans nos médias on n’arrête pas de dire que cette révolution pacifique est menacée par l’islamisme et que les chrétiens coptes sont terrorisés, avez-vous remarqué la cérémonie commune des musulmans avec les coptes ?
Je pense que cette revendication de sens, cette revendication de conviction –je ne vais pas dire de foi– je pense que c’est une chance extraordinaire pour le christianisme. Et pour le reste je vais vous dire, c’est une chance gigantesque, nous entrons dans un monde déréalisé et du triomphe de la cyberculture. Dans la cyberculture il y a un refus de la matière et de la chaire, il y a une nouvelle pudibonderie gnostique qui vient de ce monde-là, pensez à l’utérus artificiel qui est défendu par ceux qui en sont les partisans, avec une vulgarité incroyable, en disant l’utérus d’une femme c’est beaucoup moins hygiénique qu’une boîte en plastique.
Je vois et j’explique cela dans mon livre qui va paraître en mars, il y a une nouvelle pensée gnostique qui est en train de naître et qui vise à diaboliser le corps. Le corps, dans la cyberculture, c’est le symbole de la finitude, de la vieillesse, de la mort, de la dégradation et au fond l’immatériel c’est aussi une quête d’immortalité. Des gens rêvent et font des recherches très avancées sur la possibilité de télécharger la totalité d’un cerveau humain sur une disquette, c’est ce qu’on appelle «uploading». Il y en a qui y croit vraiment. Si les scientistes d’aujourd’hui, comme Jean-Pierre Changeux chez nous, pensent que le cerveau humain n’est rien de plus qu’une connexion d’informations et une connexion neuronale et que des idées comme l’âme ou comme l’esprit ça n’existe pas, alors évidemment on doit pouvoir télécharger la totalité du cerveau sur une disquette. Mais si vous téléchargez un homme dans son entier sur une disquette, le corps n’est plus qu’une dépouille inutile, dégoûtante, à proscrire. Vous verrez monter, dans les années à venir, cette forme de pensée gnostique ou platonicienne des derniers temps : le corps est le tombeau de l’âme.
Face à cela, nous avons, nous chrétiens, une réponse magnifique : c’est l’incarnation. Nous sommes une pensée de l’incarnation : le verbe s’est fait chair. Le scandale chrétien c’est cela, c’est l’incarnation, c’est la splendeur du corps, ce n’est pas le mépris ou le dégoût du corps. Même s’il y a eu dans l’histoire du christianisme des périodes de rigorisme janséniste. L’incarnation, c’était d’ailleurs la grande idée de Michel Henri, qui est mort il y a maintenant 6 ou 7 ans, je vous invite à lire son livre posthume « Paroles du Christ », j’ai lu également un livre posthume inachevé d’Ivan Illich : il y a des pages magnifiques, éblouissantes, sur l’incarnation. II se demande quand les chrétiens se rendront compte qu’ils ont ça à dire au monde, c’est-à-dire la gloire et la majesté du corps. Des penseurs font l’éloge de la force contre la faiblesse. Ceci est-il en train de nous influencer dans les pays du Nord au moins ?
Vous avez raison de soulever cette question. Je peux vous dire que dans la cyber-pensée cet éloge de la force est encore plus scandaleux que vous ne pouvez l’imaginer. Tout ce qu’on appelle le post humanisme ou le trans-humanisme, c'est-à-dire la volonté d’échapper à l’humanité traditionnelle, ça consiste à dire la technologie nous permet d’améliorer l’homme, c’est-à-dire d’améliorer ses performances, aussi bien ses performances musculaires, que ses performances psychiques, avec des implants dans le cerveau, il y a ce rêve fou de faire un homme amélioré.
Il y a deux figures marquantes de techno-prophètes aux Etats-Unis :
Hans Moravec et Ray Kurzweil. Un journaliste, un jour a posé une question au 1er : si vous souhaitez créer un homme amélioré, d’accord.
On va peut-être en créer 1 000 ou 10 000 ou 100 000 mais qu’allez-vous faire des milliards d’autres restant qui eux ne seront pas améliorés ?
Il répond placidement : les dinosaures ont bien disparu. Cette phrase toute bête est prononcée par un grand scientifique honoré aux Etats-
Unis. Autrement dit il y a des pensées redoutables qui sont en train de naître et, en effet, des pensées sur la force, la performance, la compétition. Face à tout cela les chrétiens retrouvent toute la pertinence de ce qu’ils ont à dire.
Je terminerai en vous citant une anecdote. Je suis allé récemment à
Honfleur où j’ai visité l’église Ste Catherine. J’ai été surpris de trouver sur le mur d’une travée une plaque avec cette phrase d’Albert Camus :
« Ne vous excusez pas d’être chrétien».
Je pense que lui avait tout compris.
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Le P. Jean Quris remercie Jean-Claude Guillebaud. Il poursuit en indiquant que cela nous introduit à l’axe de recherche pour ce soir : s’ouvrir aux temps nouveaux, prendre conscience de la nouvelle chance du christianisme et dans l’échange que nous allons avoir en carrefours, prendre conscience des chances de chacun de vos mouvements, communautés, associations.
Comme le disait M. Gillebaud, c’est à nous qu’il revient de faire advenir les promesses et de conjurer les menaces. Les promesses sont entre nos mains, et si l’on a choisi ce sujet-là pour ce soir, c’est parce que, avec les évêques du Conseil, nous avons été témoins plusieurs fois des recherches de plusieurs d’entre vous, dans vos mouvements, de vous interroger : comment rejoindre les cultures d’aujourd’hui, les jeunes générations ?
Certains ont déjà commencé à s’interroger, à chercher comment faire mouvement autrement, à retrouver le sens profond du charisme de chacun de vos mouvements mais en le proposant de manière nouvelle, en se laissant provoquer pour inventer du neuf avec les nouvelles générations.
C’est un peu ce pari que nous avons voulu faire. Rencontrons-nous dans la diversité des mouvements. Vous êtes là, représentants d’une soixantaine de mouvements et associations très différents, et donc faisons le pari que ces échanges en carrefours feront germer des idées que vous pourrez faire fructifier après dans chacun de vos mouvements.
M. Guillebaud souhaite ajouter un mot sur les nouvelles générations.
On est quelquefois déconcerté parce qu’on a le sentiment que ces jeunes générations ne supportent plus les moindres recommandations de morale. Je pense qu’ils ont raison. Si vous faites un cours de morale à un jeune, il ne sera pas très impressionné car il attend que vous viviez comme vous parlez.
Quand nos jeunes voient quelqu’un qui vit réellement comme il parle, ils disent dans leur jargon : « alors là, Monsieur, total respect », il nous appartient à nous d’inspirer « total respect » c’est-à-dire vivre tout simplement comme on pense.